lundi 25 août 2014

Complainte du regret (A Boris Vian)

Autrefois pour faire sa cour

On faisait des yeux de velours.

Maintenant c’est plus pareil,

Ça change, ça change,

Pour séduire le cher ange

On branche son appareil

Et on le glisse à l’oreille 


D’abord, c’est entendu, on pense au téléphone

Mais il faut pour appeler avoir du crédit

Auprès de celle-là qu’en secret l’on chérit

Pour que sans faire un numéro elle le donne.


On lui adresse un mail, l’écrit c’est plus formel !

Mais il faut même pour ces rapports textuels

Se préserver d’intrus, ces virus virtuels,

Sourdes séquences aux conséquences si réelles.

 
On envoie des textos à travers les murs, bravés

Nourris d’intimes mots qui la font bien vibrer

Et de si secrets pactes

Qu’elle seule les capte.

 
Avec le numérique Messenger du cœur

Qui sur nos écrans vient frapper comme un facteur

Même dans les moments où l’on a un amant,

La fenêtre s’ouvre aux dialogues de l’instant,

De communication piètres succédanés

Comme l’instantané l’est pour le vrai café.
 

On allume sa cam

Pour voir ce qui se trame

Et lui montrant la came,

Faire qu’elle se pâme.

 
Tout comme des drones de soi que l’on envoie,

Ces outils de persuasion si désarmants

À la disposition des modernes amants

Sont de vrais moyens de projection extérieure,

Pour de sa belle occuper le terrain du cœur

Et faire en sorte qu’il ne batte que pour soi.

 
Oui, ce sont autant de ripostes graduées

Qui visent au cœur la cible, tant convoitée !

Par l’envoi dans le ciel de missives solaires

Dont le contenu peut s’avérer terre-à-terre,

Rarement tactique et encore moins stratégique,

Faites en brut matériau, guère psychologique.

 
Un lâcher soudain de stimulis simulés

Pour parer le risque où, sans nouvelles laissée,

La belle désirée se croirait délaissée

Et alors, qui sait, pourrait bien nous oublier.…..


Mais attention, car elle en restant à distance

Et virtuelle ainsi, malgré toutes ces avances,

Conserve sa vertu intacte et inaltérable

Et à celui-là qui éprouve un petit faible,

Effrontée, du haut donjon de son château-fort,

De ne rien lui céder pourrait...se faire fort !

lundi 18 août 2014

Electriques cités



Coulent les électrons, tout comme l’eau
De source électrique dans le réseau,
Plus ou moins, entre les puissants dipôles,
S’en allant nourrir la mégalopole.

Futiles ils lutinent tels des abeilles
Sans que nul guère ne s’en émerveille,
Bougeant au gré des recombinaisons
Sans bruit, juste en subtile vibration.

À distance ils créent un champ magnétique
Qui tourne autour des câbles électriques,
Auréoles que l’on chercherait en vain,
Pareilles à celle aux têtes de nos saints.

Les câbles, qu’ils traversent au pas de charges
En leur milieu ploient sous la lourde charge,
A bout tenus par de grands bras de fer,
Comme ces traînes que les mariées serrent.

Raides, des pylônes, avec élégance,
Qui les supportent, dans les champs de France
Strient le vert de leurs lignes filiformes
Tandis qu’à leur pied pousse une herbe informe.



Leur réseau se dirige vers le Centre
Et, vus de dessus, ils paraissent être
De nos radieuses cités magnétiques
Tels les rayons, radiants et métalliques.

Villes attirantes aux êtres, nuit et jour
Parce que constamment, depuis toujours,
Identiques, oui, à un énorme aimant,
L’Homme s’y sent libre, énormément.


lundi 11 août 2014

Désastre

L’étoile filante dont tes yeux se délectent
N’est autre que la mort, oui, d’un astre céleste !
D’un coup avec éclats qui achève sa course
Parmi les étoiles et l’immuable grande ourse. 

C’est un roc tout de glace austère
Qui se brûle de toucher Terre !
Que des gaz invisibles irisent,
Qui dans ta nuit se vaporise.
 
Dans ses épanchements il éclate en lumières
Parce qu’il étouffe au sein de notre atmosphère,
Celle-là, ô pourtant qui te fait respirer
Est celle à bout portant qui le fait expirer. 

D’un cri silencieux, d’une trace,
Il se meurt par manque d’Espace !
Son espace ô combien vital,
Sur ta ronde Terre létale. 

http://mimidavril.blogspot.com/2012/01/ferme-les-yeux-et-fais-un-voeu.html

lundi 4 août 2014

Le chassé-croisé des vacances

Par un beau soir d’été, un moustique
Qui n’avait jamais connu que la lune
Par hasard croisa une mouche étique
Qui n'appréciait bien que la vie diurne.

Celle qui se faisait la belle de jour
Rencontrait le vol de nuit, bonjour !
Passage de relais, si je ne me trompe
Entre ces deux insectes à trompes.

La mouche, le voyant s'agiter excité
Se dît « Mais quelle mouche l’a piqué !? »
L’autre, piqué au vif et prenant la mouche
Pensait « Voici une tsé-tsé bien stressée ! »

Dans la nuit se croisent leurs yeux à facettes
Brillant de stupeur comme boules à facettes,
Avant qu’ils ne finissent, happés par le noir

Qui engloutît cet instant…volé, bonsoir !