samedi 15 juin 2013

Triste tropisme

Nous pensions connaître ce qu’un être a d’enfoui
D’après quelques dires que de lui l’on eut ouïs
Ou en l’ayant perçu sujet à des usages
Et ce semblable avait l’air vraisemblable et vrai.

 
Mais tout comme la lumière stroboscopique,
Éclairant l’alentour d’éclairs épisodiques,
Ne rend des mouvements qu’une image statique,
Plus la fréquence de nos brefs regards est cyclique

 
Et plus est dévoyée
L’image renvoyée.

Trompeur pour notre esprit est donc cet éclairage,
Échantillonnage de personnalité,

Ersatz d’un personnage
Comme s’il t’était cloné.

Mettre au carré

Montée progressive et jamais trompeuse
Annonçant la Cité, immense et irradieuse…

À l’approche des grandes agglomérations

De nuit, l’éclairage [ô désespoir !], au ciel
Redonne une teinte orange plutôt que noire
Etiolant à nos yeux la superfétatoire
Lueur des étoiles, rendue superficielle.

 
 À l’approche des grandes agglomérations

Si courantes en banlieue les crues pierres meulières
Cèdent, bon gré mal gré, place à l’armé béton
Quand baissent pavillon les maisons particulières
Face aux grands immeubles, cernées par leurs cloisons.

Dans les grandes agglomérations

Dans la parcimonie se perd toute harmonie !
Pourchassée, l’espèce espace craint pour sa vie
Et les mètres carrés, cotés, sont surcotés
À mesure où devient la surface comptée.

Dans les grandes agglomérations

En leur cœur où la surface n’est plus qu’utile
Nul n’a plus de place si on le croit futile
Et le mètre carré s’élève en mètres cubes
Car l’air de rien l’air procure de l’aire en tube.

Dans les grandes agglomérations

Dans leur quotidienne et subie promiscuité
Que des phalanstères de Fourier agglomèrent,
Les êtres font mine de ne plus se quitter…
Mais leur for intérieur conserve leurs mystères.

Dans les grandes agglomérations

Si tous les bâtiments prennent de la hauteur,
Emmurant les Hommes de casemates grises,
Eux vont se mettre au vert en leur matière grise,
Trouvant un refuge en cet Ailleurs protecteur.

Asile poétique

Laisse-moi pénétrer dans tes rêves,
Eux, qui sont pleins de belles images
Et d’oiseaux aux colorés ramages,
Qu’ils seraient pour moi comme une trêve.

Car les miens sont confits de conflits
Qui peuplent mon souterrain voyage
De visions étranges qui dérangent
De revenants venus d’outre-vie.

Donne-moi l’Asile Poétique,
Comme on donne asile politique,
Offre-moi Convention de Genève
Pour que loin des conventions, je rêve.

Donne-moi statut de Réfugié
Poétique en ton âme ignifugée ;
Le séjour d’un sommeil pacifique
Pour que l’insoumise insomnie crève !

« Ruche hour »

Pénètre un entrepôt devenu vide

Vide des hommes, et de leur sueur,
Du bruit assommant des machines hurlantes,
De toute cette ruche bourdonnante
Qui vibrait aux heures du rush-hour.

Vide du travail, pris comme une chaîne,
Qui, leur vie durant, les vit asservis
Mais vide aussi des entraides en chaîne,
Cet entre potes aimant, qui les servît.

Zéro absolu, et ensemble vide
Des localisations d'antan, rigides
Suite aux délocalisations aux marges,
Fuite aux productions qui prirent le large
En même temps que les machines
Vers de lointaines et dévorantes Chines.

Ici, seules désormais les abeilles,
Ultime, oui, Communauté, y veillent
Au sein de leurs ruches, industrieuses
Ainsi que quelques mouettes, crieuses.

Mise en abîmes

Boire à la bouteille, bateau ivre,
Dans l’ivresse aux profondeurs
Où le soleil est pâle comme une lune.

En la densité, se sentir léger
Et dans les fortes pressions
Faire fi des terrestres pressions.

Monde du non linéaire,
Vivant au rythme du logarithme
Sous le ciel de l’exponentielle.

Replonger dans le liquide amniotique
Au sein de la ressource halieutique
Pour dans cette bulle faire des bulles.

Voir le cycle de la vie, évident,
Là où tout survit et où tout meurt,
Lui qu’à terre on oublie trop souvent.

S’avancer, le visage masqué
Dans un carnaval de couleurs,
Improbable de probabilités.

Comprendre Darwin, et ses combinaisons
Durant cette Evolution parmi les protozoaires,
Unicellulaires mais doués d’autonomie, déjà,
Et leurs stratégies pour la survie, mutines.

Chercher à économiser l’air
Gaspillé, en vaines paroles à terre,
Atterrantes ou amères, pour se donner l’air,
Et se taire. Monde de silences en mer.

Saisir que l’air, comme la liberté,
Impalpables et gratuits, à terre,
Ne prennent leur entière valeur
Que lorsqu’ils disparaissent.

Et puis, surtout, surtout, voler sous l’eau !
Rendant grâce à Archimède,
D’un geste de palmes, académique
Epouser le relief des coraux.

………………………………………….

Las ! Refaire surface, à l’air qu’on dit libre
Et se sentir étouffé…parmi la nuée,
Tout comme cet Albatros, bien empêtré.