lundi 30 juin 2014

Lamentation de l'alimentation




Si les hommes pouvaient se nourrir de cailloux
Que la Terre rendrait, généreuse pour tous !

Si nous désaltérait l’eau salée de la mer
Que vivre cesserait d’être une mer à boire !

Belle utopie ! Car sans cesse il nous faut creuser
Et sarcler, traire extraire élever et puiser,
Dévorer le Vivant, mon semblable, mon frère
Et même l’Animal que l’on aime, si cher
Lui qui a l’aimable élégance d’oser être
Proche de nous et domestiqué, peut-être ?

Oui, pour l’Homme le paradigme terrestre
Jamais ne fut celui du paradis terrestre.

lundi 23 juin 2014

Vent debout



Cisaillent l’air les éoliennes,
Instruments à vents dont joue l’Onde
Qui tournent en rythme monocorde
Vent debout, caresse aérienne.

Monotone, leur mouvement
Au milieu des champs magnifiques
Induit de forts champs électriques
Qui s’en vont créer nos mouvements,
Hauts transformateurs bien visibles
De l’invisible en invisible.

Dis, un jour, ces moulins à vent,
Géants de métal aux longs bras
Qui bruissent dans l’air qui chuchote,
Seront-ils chargés, comme avant
A coups de lances et vains combats
Par de revenants Don Quichotte ?

lundi 16 juin 2014

Métal Létal



Je suis, vois-tu, tout comme cet arbuste
N’ayant jamais grandi, et peu robuste
Qui pousse sa vie sur la voie ferrée.

Que le passage des trains, à distance,
De son souffle violent fait ballotter
À rythme régulier, sans volonté.

Qui brièvement soulevé, s’élance
Mais très irrémédiablement retombe
Transi, dans le calme plat de la tombe.

Comme lui, mes envies velléitaires
Liées aux événements, ne durent guère,
Non maîtrisées, et me laissant précaire.

Et dans le calme entre ces deux orages
Tous deux nous espérons que viendra l’âge
Où l’on peut s’épanouir à loisir !

Mais toujours sont décimés nos envols
Par le métal du train de vie létal
Qui jamais ne nous permît de grandir.

Espèce dans l’espace, tâtonnant
Comme lui, périodiquement, j’apprends
Le réel des limites, à mes dépens.


lundi 9 juin 2014

Parait royal



En le Palais-Royal planté je suis un arbre
Parmi ses cent statues, toutes en riche marbre
Et que de jalousie autour cela génère !
Car indénombrables sont mes verts congénères
Qui auraient tout donné pour déployer leurs tiges
En cet auguste lieu, au renom de prestige !

Identique aux tilleuls plantés par vos aïeuls,
Rien n’arrête votre œil sur mon mur droit de feuilles
Ni ne s’effondrèrent jamais nos frondaisons,
Ici, règne en légions l’ordre à Napoléon !























Moi et mes compères boisés nous inspirâmes
Colette, dont ici subsiste encore l’âme
Mais qui pourrait croire à voir tant d’Institutions
Qu’y foisonnait jadis la crue prostitution ?

Bannis par le gardien sont les cris des enfants
Et nous n’aimons guère ces jeunes-là, grimpant,
Eux qui viennent arracher nos feuilles sans raison
Puis plus tard, vont graver sur nos si frêles troncs
Des serrements d’amour d'êtres écorchés vifs
Qui nous laissent à nu, comme hêtres écorcés vifs.

Tous, nous voici plantés selon une enfilade
Qui du Palais voisin singe les colonnades,
Belle perspective en juste honneur à ce lieu,
Mecque plus ultra de l’esprit de Richelieu !

J’entends dire certains, assez malignement
Que nous tous ne serions qu’arbres d’alignement.
Et même ? Il nous sied d’être décoratifs
Toujours à la pointe et élégants, tels des ifs.

Orgueilleux il est vrai de cette ombre agréable
Procurée aux crânes des hommes d’État glabres,
C’est un fait cependant que jamais en revanche
Je ne puis librement déployer loin mes branches
Alors que mes cousins des belles forêts franches
Eux poussent en liberté, et comme ça les branche !

Ce noble élagage, que l’on dit en marquise
Où aucun végétal ne peut faire à sa guise
Fait que l’hiver venu on me coupe au carré
Car croître n’est permis que d’un seul des côtés !

Cette rude entaille, qui taille sans compter
Me fait venir j’avoue, l’envie de tout planter
Et d’abandonner ce jardin à la française
Pour un beau jour qui sait, oui, filer à l’anglaise !